Eibar : Les clés de la réussite du petit poucet de la Liga

  • Par Jérémy

“Guk, bihotz emango dugu, Eibar beti aurrera!! ” (Au final nous serons toujours Eibar). Ce sont les dernières phrases de l’hymne du club basque, scandé par les supporters dans le plus petit stade de Liga (5 700 spectateurs). Eibar, ville industrielle avec ses 27 440 habitants, est une commune de Gipuzkoa (l’une des trois provinces du Pays basque), située au nord de l’Espagne. Cette cité connue comme ‘’La ciudad Armera’’, (la ville armurière) accueille aujourd’hui les plus grandes équipes de première division et ce n’est pas un hasard. Retour sur l’ascension du SD Eibar club modeste, où la valeur d’esprit d’équipe prime sur l’argent.

Quatre années difficiles en Segunda B

Avant de rejoindre l’élite footballistique espagnole, le SD Eibar a dû passer quatre années très difficiles (2009 à 2013), en troisième division Espagnole, appelée aussi Segunda B. Durant ces années, les supporters n’ont jamais lâché leur club, et c’est ce qui fait la force aujourd’hui du jeune promu en Liga. En 2012, Eibar avait choisi de miser sur un jeune entraîneur de 36 ans et ancien joueur du club, Gaizka Garitano dans l’espoir de pouvoir gravir les échelons…

Un pari réussi pour le club puisque le natif de Dério parvenait à hisser les siens dès son arrivée en Liga Adelante (deuxième division), lors de la saison 2012/2013 en terminant deuxième, juste derrière Alavés. C’est d’ailleurs grâce à une victoire contre cette même équipe que le club basque a pu rejoindre la Liga sur un but de “Jota” à la 62 ème minute de jeu.

Soixante-quinze ans plus tard…

Depuis sa création en 1940, Eibar n’a jamais été promu en première division, même si en 2005, ils avaient failli franchir ce cap, après 26 saisons passées dans les catégories inférieures. Mais le 25 mai 2014, restera l’une des dates les plus importantes de l’histoire du club.

Suite à leur montée en Liga Adelante, l’objectif du technicien basque était de maintenir club avant tout. Ce qui avait d’ailleurs été difficile lors des premières rencontres. En effet, plusieurs joueurs ont dû quitter le navire et c’est là qu’ont commencé les doutes quant au maintien. Mais Garitano a n’a pas eu froid aux yeux et réussit malgré ça, à passer non seulement au dessus mais également à se renforcer grâce aux rendements des prêts et transferts.

Une nouvelle équipe, plus forte, qui a gagné d’autant plus en efficacité malgré son petit budget qui avoisinait les quatre millions d’euros.

En 2014, les Basques ne vont pas se contenter d’une seule promotion en deuxième division mais ils vont viser plus, le summum: la Liga. Le club et les supporters doivent cette réussite historique avant tout à un seul homme, Gaizka Garitano. Vivre deux montées consécutives est signe d’évolution mais également d’un équilibre trouvé au sein du groupe. Chose que plusieurs entraineurs ont du mal à obtenir. Les Armeros ont pu se renforcer grâce à des joueurs prêtés ou libres, c’est en partie la philosophie de recrutement du club lors du mercato. Le recrutement du défenseur Raul Navas (26 ans), sans club il y a deux ans  s’était avéré concluant car il était devenu l’un des éléments clé de la formation basque.

Eibar, dans l’ombre des projecteurs de la Liga

Loin des “blings-blings”, la commune est située au milieu des collines vertes dans la bordure ouest de Guipuzcoa, dans la vallée de la rivière Ego, qui borde la province de Vizcaya. Oui vous n’arrivez pas à situer l’endroit mais cela est très loin de ressembler à la capitale ou aux grandes métropoles Espagnoles. Son stade, situé dans le quartier d’Ipurua, est repérable par les deux grandes tours de 13 étages.

Ipurua

Des habitants assez chanceux qui n’hésitent pas à s’installer les jours de matchs dans leurs balcons et profiter ainsi de la belle vue qu’offre leur immeuble sur le stade d’Ipurua. Selon une étude réalisée par le quotidien Sport à propos de la fidélité des supporters concernant leur clubs, Eibar occupe le podium.

Avec son “modeste” budget de 18 millions d’euros, Eibar est l’un des plus petits porte-monnaies de la Liga, soit 30 fois inférieur à celui du Real Madrid (520 millions d’euros). La masse salariale qui s’élève à 12,8 millions d’euros, est quant à elle, 27 fois inférieure a celle du FC Barcelone. En effet, aucun joueur sous contrat avec le club ne touche plus que le salaire minimum, soit 129.000 € par an. Garitano ne se laisse pas impressionner par les diamants de la Liga “Je pars en me disant qu’on va gagner là-bas. Si on commence à penser qu’ils ont un budget supérieur de je ne sais combien au nôtre, on va perdre le match avant même de monter dans l’avion”. Avant même de pouvoir profiter des joies de la première division, Eibar a dû faire face à un problème. En effet, il manquait 1,7 millions d’euros au club, pour pouvoir boucler le budget requis et ainsi accéder en Liga. A deux doigts d’écrire l’histoire, les habitants n’ont pas voulu laisser passer cette opportunité. La commune et les supporters ont donc créé un site pour récolter les fonds nécessaires. L’ex-international espagnol Xabi Alonso, qui avait été prêté au club basque en 2000, avait d’ailleurs participé à la promotion de la campagne. Pari réussi pour le club qui a récolté plus que prévu (1,98 millions d’euros), et donne finalement droit au club basque de goûter enfin à la Liga. ‘’Le plus beau dans le football, c’est qu’une ville comme Eibar puisse vivre quelque chose comme ça’’, a déclaré le milieu de terrain basque, Errasti.

Le malheur des uns, fait le bonheur des autres

La première saison en Liga n’est jamais facile pour les promus en général qui figurent au bas du tableau en fin de saison. C’est malheureusement ce qu’a réalisé Eibar en 2014/2015, après avoir réalisé une assez bonne première partie de saison. Les hommes de Garitano ont fini à la 18 ème place du classement devant Almeria et Cordoba qui ont été contraints de retourner en deuxième division. Malgré la victoire face à Cordoba (3-0) lors de la 38 ème journée, le club fait ses adieux à la Liga et ce n’est pas le seul puisque Gaizka Garitano a annoncé sa démission le 23 mai.

L’entraineur qui a permis à Eibar deux montées consécutives a choisi de s’en aller ‘’il n’a pas atteint son objectif de rester en première division et qu’un cycle touche à sa fin’’, avait annoncé le club via son twitter officiel. Une page qui se tourne pour l’homme qui a permis d’écrire l’histoire d’une commune de 20 000 habitants. Seulement 10 jours après le départ de Garitano, la Ligue de football espagnol communique que Eibar se maintiendra finalement. Pourquoi ?

Elche qui avait fini la saison à la 13 ème place a été contraint d’être relégué pour ne pas avoir réglé ses dettes au fisc. Cette relégation administration fut l’une des premières dans l’histoire de la Liga et a permis aux Basques d’obtenir une deuxième chance en Liga.

Toujours sans entraîneur, le 30 juin 2015, Eibar recrute José Luis Mendilibar déjà passé par Osasuna, l’Athletic Bilbao, Valladolid ou encore Levante. Le nouveau coach de 54 ans devra faire ses preuves pour que l’équipe puisse retrouver la Liga à laquelle les supporters et joueurs commençaient seulement à y prendre gout. Par ailleurs, avec son minuscule stade d’Ipurua (5.700 places), Eibar ne répond pas aux normes de la Liga qui requiert 15.000 places. En Espagne, les clubs ont le temps et disposent trois ans pour se mettre en conformité avec le règlement.

Un rêve qui durera une année supplémentaire, et pourquoi pas d’autres ?

Le nouveau défi de Mendilibar sera un défi de taille, le maintien d’Eibar en Liga. Conscient de ce poste à haute responsabilité, l’ancien coach de Levante agit rapidement et bâtit une l’équipe avec 10 nouveaux visages. L’effectif de 2014/2015 est passé de 18 à 20 joueurs pour la saison en cours. “On cherche des joueurs qui savent ce que cela suppose de jouer à Eibar”, expliquait l’année passée Fran Garagarza, le directeur sportif d’un club.

Grâce à ce renouveau apporté par Mendilibar, sa formation réalise un bon début de saison mais il va donc falloir continuer à travailler après de nombreux sacrifices et se surpasser pour saisir cette deuxième chance qui leur a été offerte.

“Eibar hiri gustiz eredugarria. Eibar donde el trabajo es arte”. (”Eibar ville hautement exemplaire, Eibar à l’endroit où le travail est un art), telle est la devise de la ville …

Eibar

 

Sur Foot Espagnol